Vers le premier collège de Combrée (épisode 3)
Depuis 1810, l'abbé François DROUET est curé de Combrée où il a déjà créé une école presbytérale qu'il compte bien faire évoluer ; alors qu'à cette époque, les écoles catholiques de niveau supérieur au primaire sont peu nombreuses et surtout en sursis sur le plan politique. |
Les premiers combats de l'abbé Drouet (1810-1818) ?
François Drouet a comme vœu de créer un collège ... sans avoir les autorisations et les diplômes !
Henri Gazeau (in "Combrée, ma maison") explique ce qu'est la législation scolaire à cette époque :
F. Drouet bien que professeur à l'école secondaire de Beaupréau, n'a aucun diplôme ! Il envoie donc une « pétition » au Grand-Maître de l'Université, M. Louis de Fontanes ; ce dernier lui répond en avril 1811 qu'il ne pouvait autoriser que la création à Combrée d'une école primaire. |
F. Drouet, à l'affut d'une autre solution, saisit l'occasion à l'annonce de la construction éventuelle d'un collège à Segré et envoie une nouvelle « pétition » au Grand-Maître lui demandant d'attribuer à son école le titre de collège ... en attendant la construction du collège de Segré. Cette pétition fut transmise au sous-préfet de Segré, Michel-Pierre Jarry de Montpelleray, qui donne l'autorisation à M. Drouet de creéer un collège ... à Segré !
Le 21 août 1811, le recteur (par intérim encore à cette date), M. François Mazure, demanda au Grand-Maître de suspendre sa décision et à M.Drouet ".. de ne pas augmenter le nombre de ses élèves, externes ou pensionnaires" jusqu'à nouvel ordre c'est-à-dire jusqu'à la décision du projet de créer un collège de Segré ...
Par décret du 15 novembre 1811, en réaction à la concurrence des établissements privés, l'Université décide de limiter les niveaux de leurs classes aux 6ème et 5éme ! À Combrée, en 1811 l'effectif passe de 33 élèves à la rentrée de 1811 à soixante-trois à la rentrée 1812. F. Drouet demande alors à l'Université d'être nommé chef d'institution permettant ainsi aux enfants de rester à Combrée pour terminer leurs études secondaires au lieu de s'expatrier jusqu'à Angers. Le Grand-Maître refuse, M. Drouet n'ayant pas des diplômes correspondants. Début 1814, apparait cependant subrepticement une nouvelle classe dont le niveau s'apparente à celui d'un lycée. Nécessité fait loi pour notre maitre de pension !
Chute de l'Empire, Restauration, Cents Jours, Seconde Restauration : la pension de Combrée subit alors le contre-coup des évènements politiques et voit ses effectifs baisser, la législation scolaire initiale est maintenue.
Mgr Montault, évêque d'Angers, qui avait ordonné prêtre François Drouet, l'avait nommé à Combrée et ignoré depuis, se décide à venir à Combrée pour la distribution des prix de 1818 :
Louis Levoyer (in « Notice historique ») cite cet épisode :
Et Henri Gazeau de commenter :
Du petit séminaire à l'école ecclésiastique (1818-1823)
Maintenant que la "pension Drouet" a l'appui de l'Évêque, M. Drouet s’enhardit vis à vis des règlements ... il crée en 1820 une chaire de philosophie. Réaction immédiate du recteur Antoine Poullet de Lisle qui fait à l'Évêque la liste des griefs à l'encontre de son protégé : sommé de s'expliquer, Drouet répondit point par point au recteur, de façon assez vive ! (lire dans "Combrée, ma maison" pages 49 à 51).
Pour aplanir ces difficultés, Mgr Montault demande au gouvernement l'autorisation d'établir à Combrée un second petit séminaire diocésain ... avec l'appui d'un rapport positif du recteur. Le 1er juin 1821, ce dernier signifie à M. Drouet l'autorisation de faire de la pension de Combrée un petit séminaire ... avec la mention « se borner rigoureusement à la classe de 4ème ».
Lorsque le recteur reçoit des mains d'un élève de Combrée un certificat de rhétorique [actuelle 1ère], il explose ! ... Voici la réponse de M. Drouet à son recteur :
Le recteur ne poursuivit pas cet échange. M. Drouet revient alors à la charge et prie son évêque de demander aux autorités d'ériger à Combrée une seconde école ecclésiastique après celle de Beaupréau ; cette création exige l'accord du Roi et de l'Université :
Louis Levoyer précise :
La fin des tracasseries ? (1823-1829)
Les travaux entamés dès 1820 dans le presbytère de Combrée se poursuivent. L'établissement héberge maintenant 300 élèves. D’après Louis Levoyer :
À l'avènement de Charles X en 1824, les adversaires de la Monarchie ont lancé une grande offensive anticléricale ! Le 16 juin 1828 deux ordonnances modifient profondément la législation religieuse et scolaire :
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Malgré leurs inquiétudes, les deux écoles ecclésiastiques - Combrée et Beaupréau - furent maintenues, même si le nombre d'élèves ecclésiastiques fut limité à 400 (donc 400 demi-bourses pour l’établissement). Leurs supérieurs MM Drouet et Mongazon sont agréés par le gouvernement.
Le 28 janvier 1829, le recteur se voit forcé de demander au Ministre de fermer les yeux sur une autre infraction détectée à Combrée, à savoir accepter les externes, chose désormais interdite.
De façon très machiavélique [dixit H.Gazeau], l'abbé Drouet annonce au recteur qu'il « se bornerait à redevenir simple maître de pension au cas où serait déclaré incompatible le cumul de ces fonctions avec celle de supérieur d'école ecclésiastique » ; il adresse aussi cette lettre au Ministre de l'Instruction Publique en y ajoutant une supplique : celles de conserver huit à dix élèves laïcs pour les préparer au Baccalauréat ...
Hélas le ministre sur indication du Conseil royal n'accorda à l'abbé Drouet que le droit de redevenir maître de pension ! M. Drouet profita-t-il de cette autorisation ?
Certains anciens élèves de cette période sont des figures combréennes :
Mgr Étienne Charbonneau, c.1825, vicaire apostolique de Mysore (Inde), très souvent dans les Bulletins
Cardinal Frédéric de Falloux, c.1825, né au Bourg d'Iré quatre ans avant Alfred homme politique, soutien de Combrée,
Chanoine Louis Levoyer, c.1825, Supérieur du Collège de Combrée de 1837 à 1865. Cf. sur ce site
auteur de "Notice historique de l'Institution de Combrée" téléchargeable ici.
Jusqu’où cette savante ambiguïté orchestrée par François Drouet peut-elle se poursuivre ?
L'histoire romanesque du fondateur de Combrée n'est pas terminée ...
Rendez-vous au prochain épisode du focus pour en connaître l’épilogue !
Sources : Annuaire de 1988, Combrée, ma maison de H.Gazeau, Notice historique de Louis Levoyer, Wikipedia.
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